Ce qui vit le rouge-gorge

- Mais alors, il risque de se faire prendre ! - Mais non, puisqu'il se sera confectionné un alibi inattaquable, comme je vous l'ai expliqué ! Et j'ajouterai qu'il jouira encore davantage de la situation si des soupçons pèsent sur lui ! Autrement dit, la police se doute bien qu'il est le meurtrier, mais il est trop malin, trop habile pour pouvoir être confondu !
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Roman - Noir

Ce qui vit le rouge-gorge

Psychologique - Social - Vengeance MAJ lundi 31 août 2015

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

Laurence Biberfeld
Paris : Au-delà du raisonnable, juin 2015
328 p. ; 19 x 13 cm
ISBN 978-2-919174-25-6

Il ne faut jamais faire aux truies...

Chez Sophie et Jean-Mi, on fait dans le cochon. Du gros, du gras, du martyrisé, castré, rentabilisé pour fournir toujours plus de viande. C'est là qu'arrive la mystérieuse Garance, une employée de maison parfaite, travailleuse et silencieuse, qui tente d'échapper à un lourd secret. C'est pourtant cette femme effacée qui va déchaîner les passions : d'abord la jalousie de Sophie, puis les soupçons lorsque la malveillance et la malchance s'abattent sur l'exploitation. Garance chercherait-t-elle à se venger ? Mais de quoi ?
Un nouveau roman de Laurence Biberfeld (surtout ici après les excellents Les Enfants de Lilith et La Meute des honnêtes gens) fait toujours figure d'événement, enfin, chez ceux qui aiment encore la vraie littérature fichée dans cette zone grise entre blanche et noire où l'on trouve les plus belles pépites. Et ce n'est certainement pas par hasard que la romancière aborde un sujet on ne peut plus d'actualité ! Tout comme précédemment, on sent l'influence du naturalisme : il y a du Zola dans ce mélodrame (sans connotation péjorative) rural où les passions couvent sous le vernis du quotidien. L'auteure convoque également le fantastique pour donner la parole aux grands muets : les animaux eux-mêmes, en des pages qui pourraient faire artifice, mais qui trouvent heureusement leur signification (et l'explication du titre) lors d'un finale fuligineux qui laisse suffisamment de zone d'ombres sur les intentions de chacun pour mériter un nouveau passage. Parce que, comme les précédents ouvrages de Laurence Biberfeld, on n'est pas dans la littérature "facile", mais plutôt devant celle qui prend aux tripes et appuie là où ça fait mal — pour notre plus grand plaisir ! On regrettera juste qu'elle ne donne pas un peu plus de facilités au lecteur. Vu le nombre de personnages, il faut être attentif pour se rappeler qui est qui et quels sont les différents enjeux. La quasi-absence de descriptions ne facilite guère la tâche. Mais loin des starlettes médiatiques, Laurence Biberfeld reste l'une des auteurs les plus intéressantes du moment. Quant aux éditions Au-delà du raisonnable, il y a longtemps qu'on les a placées avec Asphalte, Kyklos et Wombat, chez ceux qui s'évertuent contre vents et marées à faire bouger les lignes — et qu'on trouve généralement dans la petite pile au fond à droite, derrière les têtes de gondole...


On en parle : L'Indic n°23

Citation

Quelle catastrophe, la vie, quel carnage. Elle voit la sienne comme un paysage dévasté par la guerre où subsistent ça et là des garennes miraculeusement épargnées, des petits chemins où les adolescents s'embrassent, cachés derrière les arbres, des halliers abandonnés entre les cratères de bombes, des landes négligées par les armées belligérantes.

Rédacteur: Thomas Bauduret lundi 31 août 2015
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