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Contenu

Roman - Policier

Punk friction

Social - Urbain MAJ mardi 27 février 2018

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

Jess Kaan
Paris : Lajouanie, septembre 2017
276 p. ; 19 x 13 cm
ISBN 978-2-37047-084-3
Coll. "Roman policier, mais pas que"

Faits divers dans les Hauts-de-France

Quatre punks (deux gars, deux filles) débarquent à Auchel, cité des Hauts-de-France, pour picoler, zoner et faire chier le monde. Seulement, comme aurait pu dire un personnage incarné par Clint Eastwood : "la taquinerie, c'est bien gentil, mais faut pas emmerder n'importe qui" (d'accord, Clint Eastwood aurait plutôt dit : "shut up, fucking bastard", mais j'avais envie d'un peu de poésie). Toujours est-il qu'on ne sait pas bien qui les punks ont eu la mauvaise idée d'emmerder, mais le fait est que par un froid matin d'hiver, on a retrouvé l'un d'eux en train de cramer dans le cimetière tandis que les trois autres, on ne les a pas retrouvés du tout.
Chargé de l'enquête, Philippe Demeyer, flic blasé, taiseux aux airs de dur à cuir, se cogne pour adjoint le jeunot Boris Lisziak, fraîchement sortie de l'école, autant dire pas encore irrespectueux des usages du manuel au profit de ceux du terrain, et un peu frileux (même devant le corps surchauffé d'une victime que son meurtrier a transformé en torche humaine) quant au comportement à adopter avec son partenaire. Le duo, se voit rapidement affublé d'un officier de police du patelin, lieutenant Fazuras (Garance de son prénom), jeune femme débrouillarde et décidée qui kiffe son job. Bientôt une seconde affaire vient empiéter sur les plates-bandes de la première : le cadavre endommagé (c'est rien de le dire) d'une étudiante en droit nommée Sarah Vignard...
Avec Punk friction, Jess Kaan nous parle d'une région qu'il connaît bien, une région en proie aux difficultés, abandonnée, parfois montrée du doigt, raillée, mais qui s'obstine à tenir debout face à un monde où l'économie n'est plus basée sur le prix de la tonne de charbon mais sur celui d'une projection de dividendes pour actionnaires aux cœurs étouffés par la taille de leur portefeuille. L'auteur, sous couvert d'un genre littéraire de divertissement, le roman policier (et je l'en remercie), dresse ici une critique acerbe d'une société où la frustration, la solitude, le sentiment de rejet, la haine, la méfiance (malheureusement à juste titre), la perte du rationnel, le manque de repère d'une jeunesse tellement blasée de tout avant de n'avoir rien vécu qu'elle ne connaît même pas le goût du désespoir, côtoie une police composée d'hommes et de femmes qui essaient tant bien que mal de faire leur boulot, sans moyen, sans effectif, sans être craint (y compris par les caïds d'opérette). Une police qui ne trouve plus dans les rues ni respect ni compassion, qui évolue sans soutien d'une hiérarchie qui ne pense qu'à sa carrière, sans aide ni écoute d'une classe politique pour qui une réélection est plus importante que de réaffirmer le pouvoir et la présence de l'État dans chaque région, département, ville, quartier, cité du pays. Au milieu de ce jardin où ne poussent en majorité que les mauvaises herbes, les chardons et les orties, quelques fleurs parviennent à se hisser au-dessus du niveau de la merde. Des fleurs étudiantes, des fleurs flics, bref des fleurs sauvages (puisque manifestement la civilisation a tourné au fiasco), de celles qui tentent de rêver, de vivre, d'aimer, même si elle savent que c'est ce qui leur vaudra peut être d'être piétinées.

Citation

Quatre paumés du Nord, le genre de gosses comme il en existe des milliers, une génération sacrifiée par un système à bout de souffle. Enfants cassés, enfants broyés par des rouages socio-économiques les dépassant. Difficultés familiales au sein de tribus éclatées, borderline, échec scolaire lié à leur différence, aucune perspective et aucune possibilité de rémission : le quatuor avait fini à la rue où les tentations s'avéraient nombreuses.

Rédacteur: François Legay mardi 27 février 2018
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