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Tout public
Paris : Fleuve, mai 2018
526 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-265-11780-8
Coll. "Fleuve noir. Thriller"
Goût d'inachevé
Policier de la criminelle atteint d'hypermnésie, Vic Altran et son adjoint Vadim Morel sont appelés suite à une découverte macabre : un contrôle de routine forcé, un accident de voiture tuant le conducteur et, dans le coffre, le cadavre d'une femme au visage écorché et aux mains tranchées. Il apparaît bien vite que le conducteur, un jeune délinquant, a volé la voiture après le braquage ordinaire d'une pompe à essence. Affaire encore plus sordide lorsque l'on constate que les mains tranchées ne sont pas celles de la morte ! Il va falloir courir contre la montre pour sauver une jeune aveugle...
Léane Morgan est plus connue sous son pseudonyme d'Enaël Miraure, auteur de polars à succès. Mais elle et son mari Julian sont marqués par la disparition de leur fille Sarah quatre ans plus tôt. Six mois plus tard, ils ont reçu par la poste cinq cent douze cheveux – pas un de plus – même si Sarah ne fut jamais retrouvée. Or Julian, détruit par cette affaire, envoie à Léane un message comme quoi il a reçu des informations sur leur fille. Peu après, il subit une agression qui le laisse amnésique. Alors qu'un obscur auteur accuse Enaël Miraure de plagiat, le couple va se retrouver mêler à la sinistre carrière du tueur en série appelé le Voyageur... Mais tout ceci n'est qu'une fiction écrite par le célèbre auteur Caleb Traskman, qui s'est inexplicablement suicidé avant de la terminer. Un manuscrit inachevé (titre également du roman fictif d'Enaël Miraure) que son fils va devoir conclure...
On avait laissé Franck Thilliez après le diabolique Rêver, l'un de ses meilleurs romans, et l'à peine moins bon Sharko. Là, l'auteur (qui n'est pas du genre à s'endormir sur ses lauriers) surprend en abandonnant ses personnages récurrents pour emprunter la formule du livre dans le livre, tissant donc un jeu de miroirs entre fiction et réalité. L'intrigue dûment complexe suit pourtant des chemins agréables mais bien balisés où, sans déflorer, Franck Thilliez reprend une thématique chère à Maxime Chattam sur la propagation du Mal. Malgré une vague impression de mini-série télévisuelle due à un certain nombre d'archétypes, certes bien employés – d'un thriller industriel, on demande plus l'efficacité que l'originalité –, jusqu'à ce que vienne la fin... Une fin qui déçoit en employant l'un des pires clichés du répertoire policier, et qui n'est imprévisible que parce qu'on n'attendait guère l'auteur dans ce registre. Du coup, on s'aperçoit que la thématique du "livre dans le livre" n'aboutit pas sur la mise en abyme ou la pirouette expliquant les mystères initiaux (à commencer par le suicide de l'auteur fictif) que l'on attendait de ce grand tricoteur d'intrigues qu'est Franck Thilliez. Cette fin étant censée être rajoutée sur un manuscrit inachevé, est-ce une façon de se défausser, rejetant la faute sur un scripteur fictif ayant repris le roman sans disposer d'un plan dévoilant la fin ? N'empêche, on en sort d'autant plus déçu que l'attente était grande. Mais tous les auteurs, surtout aussi prolifiques et avec un tel taux de réussite que Franck Thilliez, on droit à leur passage à vide. On attendra la prochaine cuvée avec une confiance entamée...
Citation
Vic détestait les débuts d'enquête, trop de directions qui lui donnaient souvent la migraine. Avec un peu de chance, cette affaire-ci pourrait prendre fin avant même de commencer puisque leur principal suspect – un visage sur une carte d'identité – était mort. Seul hic : comme il ne répondrait jamais à leurs questions, ils allaient devoir trouver les réponses eux-mêmes.