La Légende de Santiago

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Roman - Noir

La Légende de Santiago

Vengeance - Drogue - Urbain MAJ samedi 20 octobre 2018

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21 €

Boris Quercia
La Sangre no es agua - 2018
Traduit de l'espagnol (Chili) par Isabel Siklodi
Paris : Asphalte, octobre 2018
250 p. ; 20 x 15 cm
ISBN 978-2-918767-82-4
Coll. "Fictions"

Une vie de chien

Santiago Quiñones, le flic chilien de Boris Quercia, Grand Prix de Littérature Policière en 2016 pour Tant de chiens, reprend du service, de la drogue et des coups dans un second roman crépusculaire où il perd une à une toutes ses illusions.
Le personnage d'enquêteur de Boris Quercia n'est pas un tendre. Ou alors, il cache bien son jeu. Dès le début du roman, il raccourcit la vie de son beau-père qui git dans un lit médicalisé en attendant la mort. Cette dernière est au creux d'un oreiller, mais n'est pas des plus jolies. Une crémation plus tard, s'il a perdu un beau-père et récupéré une mère allez savoir pourquoi éplorée, il a gagné un demi-frère sous dialyse, Gustavo. Ce qu'il rechigne à admettre. Quelques pages plus tard, il perd Marina, son grand amour, lassée de ses frasques extra-conjugales et il gagne un demi kilo de cocaïne dans un restaurant chinois. C'est comme ça. C'est comme si sa vie se résumait à la phrase de Lavoisier : "Rien ne se perd, rien ne se crée tout se transforme." Et pour ce qui est des transformations, Santiago Quiñones va être servi. Deux cent cinquante pages à subir les événements sans vraiment se révolter. À se lamenter non pas sur son sort, mais sur son passé. À multiplier les errements, les erreurs et les erreurs de jugement. À penser qu'il va comme toujours s'en sortir alors qu'au fond de lui, il ne le souhaite pas ou plus. Les deux enquêtes policières du roman sont ici en filigrane, comme si elles n'étaient pas des plus importantes. Comme si chercher le coupable qui a tué un Chinois au Chili était somme toute secondaire. Comme si retrouver un petit trafiquant boiteux n'était pas primordial. Boris Quercia plante son décor, mais pas son personnage. Ce qui l'intéresse, c'est la descente aux enfers de Santiago Quiñones qui se suicide à la fois à la cocaïne, à l'alcool, au sexe, par ses actions et aussi son incapacité chronique à dire les choses, tant auprès de ses collègues (dont son coéquipier García), que de ses proches (dont Marina). Pourtant, il est aimé, pourtant il aime les gens à sa manière. Mais c'est un taiseux qui s'accomode de sa lourdeur d'esprit. Le nœud gordien du roman, c'est sa relation fusionnelle avec Angélica, la nouvelle femme de son coéquipier García. Elle a toujours été la femme d'un de ses coéquipiers. Le précédent est mort. Ils ont toujours couché ensemble. Ils ne se l'expliquent pas, mais ça les aide à traverser leurs épreuves réciproques. Mais ni García ni Marina ne pourraient l'admettre. Marina, c'est son amoureuse d'infirmière, qui le quitte parce qu'elle ne veut pas mélanger travail et vie de famille. Parce qu'elle ne veut pas le soigner de ses nombreux troubles et qu'elle souhaiterait juste le troubler. Or Quiñones peut très vite être troublé, et il ne réfléchit pas avec ses neurones noyés dans l'alcool et la drogue, mais avec son sexe. Alors, nous assistons à une longue fuite éperdue entre espoirs et désespoirs au milieu de rebondissements ordinaires dans la vie d'un flic chilien avec les éléments extraordinaires du Chili pour venir parfaire le décor. Santiago Quiñones partagera dans les dernières pages un autre point commun avec Lavoisier, plus ironique, plus caustique. L'écriture est implacable de noirceur, et l'on se demande jusqu'où ira Boris Quercia pour malmener son héros de flic désabusé. La réponse est : "Loin, très loin."

Citation

J'accumule les morts : c'est comme si, en tuant le monsieur, j'avais donné un ordre d'exécution et que depuis, des soldats fous tiraient à l'aveugle autour de moi. Les corps tombent comme des mouches et je ne sais pas comment arrêter l'hémorragie.

Rédacteur: Julien Védrenne samedi 20 octobre 2018
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