Si Le Poulpe est un personnage libre et libertaire qui a eu quarante ans en l'an 2000, Antoine Chainas le projette dans le Paris de 2030, alors qu'il est quasi grabataire. Certains de ses proches sont morts, d'autres éternels. Il ne bande plus ou presque, et est obligé de s'offrir une séance de Porn-incarnation pour s'envoyer en l'air comme à ses plus tendres années avec Chéryl. En 2030, évidemment, la science et l'ultra-capitalisme ou libéralisme ont fait des progrès. Une grosse entreprise domine sans fois ni loi : Omnicron Inc, qui produit des Omnimorphes, des clones d'humains qui n'ont ni conscience ni souvenirs (on vous passe les © Omnicron Inc 2020 qui pullulent). Mais un étrange tueur s'attaque à la première génération dont fait partie Georgie, celui avec qui Le Poulpe a eu sa séance de baise, et en qui remonte justement un souvenir. Georgie est en danger. Le Poulpe le sent. Alors il repart en croisade et va trouver un allié en la personne d'un étrange bouquiniste, ancien scientifique. Une course contre la mort s'installe pour amener Georgie en un lieu stratégique, pendant que Gabriel use et abuse des clones, vomit boyaux et tripes, tue sans vergogne ou presque, mais est totalement impuissant dans une histoire où il est somme toute transparent.
Et c'est là que c'est dommage. En quelques deux pages – allez quatre – Antoine Chainas se débarrasse des éléments constituant l'essentiel de la bible de la collection. Il dresse vite fait un aperçu du Pied de porc à la Sainte-Scolasse, le temps que Le Poulpe prenne sa bière bio OGM bizarre et pose ses yeux sur un Gérard hémiplégique en fauteuil roulant. Le reste n'est qu'une histoire qui pourrait faire partie de n'importe quel roman, et encore, difficile de s'immerger dans ce roman tant l'écrit est fragmenté. On a l'impression de se trouver devant un puzzle au motif étrange, les pièces assemblées entre elles avec un marteau. À la fin seulement, on découvre un autre récit, un véritable mais trop court roman comme si enfin Antoine Chainas s'était approprié son histoire. Seul survit le bouquin qui accompagne l'intrigue, et qui donne son titre à cet épisode : 2001, odyssée de l'espace. On attendait mieux d'Antoine Chainas qu'un roman de science-fiction aux théories à peine effleurées, pour atteindre au final la dimension d'un jeu vidéo où tout va trop vite avec une manette de jeu aux commandes inversées.