S'agit-il d'un Trainspotting à la française ? En tout cas, ce roman glacé et glaçant mérite bien le titre de roman noir : le lire d'une traite, c'est comme de s'envoyer l'intégrale de Joy Division de nuit, à la lumière glauque d'un réverbère dans une friche industrielle désaffectée. On est loin de certaines visions complaisantes de dealers cools et branchés… La came, c'est l'enfer, et c'est bien ce que montre ce texte d'Éric Maravélias en évitant soigneusement les écueils du misérabilisme ou de la complaisance. À travers cette histoire étalée sur deux époques, de l'ère de la naïveté aux années sida où les cadavres s'amoncellent, on se situe une fois de plus au confluent des mauvais genre et de la blanche : le début est très écrit, parfois aux limites du surécrit, écueil qu'il faut surmonter pour en arriver à la substantifique moelle. Et si tout n'est pas d'une originalité foncière, c'est le prix de la crédibilité : on croit du début à la fin à l'histoire d'Eckel, narrateur décavé dont la vie tout entière est marquée au fer rouge par la came ; et si on se doute qu'il n'y a pas de fin heureuse, c'est l'itinéraire pour y parvenir qui compte vraiment. La Faux soyeuse est un bel exemple de littérature à l'estomac. Espérons que l'auteur, qui semble maîtriser son sujet (ou alors qui fait sacrément bien semblant) ne sera pas celui d'un seul livre…