CHRONIQUES

livres • bandes dessinées • comics
Prix : 22.5
INFORMATIONS LIVRE
Édité chez
Collection :
ISBN : 978-2-07-014229-3
Nombre de pages : 448
Format : 16x23cm
Année de parution : 2012
Titre original : Kautokeino, en blodig kniv
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8 / 10

La Loi des Sames

Série :

Un monde moins blanc que neige

Le livre est essentiellement narré à la première personne par la juriste Anna Magnusson, d'origine same par sa mère, jadis partie à Stockholm (le « Grand Sud » !) pour devenir institutrice et ayant de ce fait trahi sa communauté. Anna est appelée en Laponie (norvégienne) par sa grand-mère, Ottilia, pour participer à la défense de son cousin, Nils Mattis, de quatre ans son cadet, qui est à nouveau accusé de viol par une certaine Karen Margrethe. Sur la route, elle renverse par accident un renne qu'elle doit achever au couteau et elle est fraîchement accueillie par sa tante, Sara Marit, et l'intéressé lui-même, qui semble plus intéressé par la boisson que par sa défense. Quoi que se demandant ce qu'elle fait là, elle s'attarde sur place, se fait saboter sa voiture, apprend la mort de Karen Margrethe (de froid ou de médicaments) et découvre un cadavre dans un tas d'entrailles de rennes. Le reste du livre tourne autour des vols de rennes (mais ceci ne « regarde pas la police » et se règle entre soi), de l'inceste, de la drogue, de la corruption, etc. C'est ce qui fait que, bien que paru dans une « Série Noire » désormais fourre-tout, ce livre est en fait un « vrai » roman (à certains moments assez émouvant) doublé d'une étude exempte d'idéalisation sur les mœurs, la mentalité, l'artisanat, les trafics et les nécessités de l'un de ces peuples « premiers » confrontés à la « modernité », sans taire tous les faits tristement banals et rudes liés à une lutte quotidienne pour la survie pas très facile quand tout dépend de celle d'un troupeau de rennes dont l'existence peut être menacée par une explosion survenue à des milliers de kilomètres de là – par exemple dans un endroit au nom improbable de Tchernobyl. Rien ne manque, même pas le sport, le droit des femmes dans un contexte social traditionnaliste (forcément « macho »), ni les rivalités entre les Sames de l'intérieur du pays, éleveurs de rennes, et ceux de la périphérie et de la côte, plus intégrés à l'environnement ethnique, social et économique. La grande question est au fond de savoir si notre code juridique et moral (voire vestimentaire) peut s'appliquer à un peuple dont les conditions de vie et les valeurs fondamentales sont si différentes, sans compter la faille entre les générations. Il serait donc très réducteur et injuste de qualifier ce livre de roman policier. L'étude de milieu est bien menée et convaincante (comme dans Le Dernier Lapon et Le Détroit du loup d'Olivier Truc), les nombreux termes et expressions sames sont un gage d'authenticité, et le livre se lit avec un intérêt soutenu, même si on peut regretter que la traduction ne soit pas toujours à la hauteur, surtout du fait d'une narration à la première personne du passé simple. Le travail éditorial a peut-être été laissé aux bons soins du lecteur par mesure d'économie ?

Article initialement paru le 2 mars 2015
Publié le 21 mai 2025
Mis à jour le 21 mai 2025
Quel rôle notre système juridique moderne pouvait-il bien jouer dans une société qui présumait que la loi et le droit dépendent du contexte social et des expériences accumulées au cours de l'histoire ?
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