CHRONIQUES

livres • bandes dessinées • comics
Prix : 23,90 €
INFORMATIONS LIVRE
Édité chez
ISBN : 978-2-38399-215-8
Nombre de pages : 624
Format : 23 X 15 CM
Année de parution : 2025
Titre original : The House With Nine Locks
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7 / 10

La Maison aux neuf serrures

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Philip Gray nous invite à la découverte d'Adelaïs De Wolf, une jeune femme dans la Belgique grise des années 1950, qui va découvrir son destin en s'embarquant dans une activité criminelle, un peu comme un jeu, un jeu qui a détruit beaucoup de monde, mais où elle rayonne de sa force tranquille. Le tout avec une maîtrise ingénieuse du récit.

Dans les années 1950, Adelaïs De Wolf, jeune fille qui boite depuis qu’elle a eu la polio, vit avec ses parents une existence difficile. Son père est un ancien graveur, exclu du métier pour des accusations de collaboration et qui survit en s’étant reconverti comme horloger. Il boit sans doute un peu trop. Sa mère a un petit emploi dans l’usine locale mais c’est mal payé et les entreprises commencent à souffrir de la concurrence. Elle s’éloigne de sa famille, obnubilée qu’elle est par la religion. Seul rayon de soleil : son oncle, un homme solaire et mystérieux. Un jour, il lui offre un vélo spécial qui fonctionne avec des pédales à bras. La jeune fille fait des tours plus grands et va ainsi sauver de la mort Sebastian, un jeune homme qui allait se noyer. Ce dernier devient son ami, mais il est d’une famille plus aisée et apprécie Adelaïs comme une sœur. Il a un rêve : devenir architecte et acheter une demeure de la ville qui tombe en ruines. Alors qu’elle travaille dans un café, Adelaïs voit sa mère partir pour travailler pour une congrégation religieuse à Lourdes puis en Afrique. Son père boit de plus en plus et Sebastian lui présente sa « fiancée ». Aussi, lorsqu’elle découvre qu’elle hérite de son oncle et qu’elle fouille sa maison (celle aux neuf serrures), elle reprend ses activités de faux monnayeur avec l’aide de son amie d’enfance. Son but : économiser pour acheter la ruine citée plus haut et en faire un hôtel de luxe. Mais entre les secrets de famille, la poursuite obsessionnelle du faux monnayeur par le policier De Smet, et ses propres désirs, Adelaïs ne risque-telle pas de tout perdre ?

Après Comme si nous étions des fantômes, Philip Gray signe là un deuxième titre qui confirme ses talents : sens du récit à travers un roman qui alterne la progression humaine et psychologique de l’héroïne, toute en nuances et en petites touches crédibles et le travail obstiné d’un policer qui voit son enquête très complexe prise dans un compte à rebours car les faux billets (comme les vrais) vont bientôt être retirés de la circulation. L’auteur s’appuuie sur une description très fine des gens ordinaires dans la Belgique de l’après-guerre – sans doute inspiré et aidé en cela par les textes de la même période qu’écrivait Georges Simenon, cité plusieurs fois dans le cœur du texte), avec des personnages, y compris les seconds rôles, très attachants – outre Adelaïs, ses parents, l’oncle, sa meilleure amie, le policier et son adjoint, un prêtre, Sebastian et sa famille -, montrés avec soin, dessinés ou esquissés dans une vérité forte. Même si le lecteur attentif et habitué aux romans policiers aura compris le rapport entre la scène d’ouverture et la suite, La Maison aux neuf serrures ressemble, et c’est un compliment pour celui qui écrit ces lignes, aux romans durs, axés sur la psychologie des personnages, sur leurs failles et envies, de Simenon. Mais là où l’écrivain belge restait souvent assez noir et pessimiste, Philip Gray, au contraire, nous en offre une version plus lumineuse, avec cette description d’un personnage, blessé par la vie, trompé par tous et qui va mener sa barque de splendide façon, sans négliger les côtés polars d’une intrigue très réaliste.

Publié le 17 septembre 2025
Mis à jour le 6 septembre 2025
De Smet referma la caisse et contempla la jeune femme, mains dans les poches. Il s’approcha tout près, sourcils froncés. Elle sentit son eau de Cologne, la laine humide de son manteau. « J’ai consacré ma vie à la loi, mademoiselle De Wolf. Toutefois loi et justice ne se confondent pas toujours. Je l’ai appris. »
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