Le récit court d'octobre à décembre 1774.
Louis XV est mort ; Louis XVI vient de commencer son règne. Cela a entraîné quelques changements, dont une promotion pour Monsieur de Sartine, nommé secrétaire d'État à la Marine – mais il semble bien continuer, en, sous-main, à mener quelques affaires de police, bien que son poste de lieutenant général soit désormais occupé par Monsieur Le Noir. Nicolas, lui, est encore sous le coup d'une disgrâce. Mais voilà que les affaires reprennent : il est mandé chez Monsieur de Saint-Florentin, duc de la Vrillière et ministre de la Maison du Roi ; on a trouvé dans les cuisines le corps atrocement meurtri d'une domestique récemment engagée, et le maître d'hôtel blessé, avec quelque apparence qu'il se serait homicidé après avoir tué la jeune fille. Comme de juste, les apparences sont trompeuses ; Nicolas et ses acolytes – Bourdeau, Semacgus, Rabouine, Tirepot… – épaulés par Monsieur de Noblecourt, fouillent dans le passé de la jeune victime Marguerite Pindron, dans les histoires de famille du maître d'hôtel puis, de découvertes en découvertes – dont deux cadavres supplémentaires portant des meurtrissures analogues à celles du corps de Marguerite – s'aventurent sur le terrain miné des nobles débauches…
La conduite de cette enquête est l'occasion de pénétrer les lois de certaines corporations et de s'immiscer dans le monde ancillaire. On en découvre les puissantes hiérarchies, et la complexité de trafics en tout genre opérés à l'insu de maîtres servis avec une déférence de façade qui s'avère n'être qu'une couverture habilement tirée sur tout un univers parallèle.
Qualité documentaire, cadavres aux blessures atroces autant qu'étranges, fausses pistes, activités souterraines et débauches clandestines, bisbilles de cour… : ce cinquième volume ne surprendra ni par sa facture ni par son style, ni par son intrigue, assez convenue bien que retorse. Seule l'évolution du contexte historique, assortie des changements intervenus dans la vie privée des principaux protagonistes – ainsi voit-on apparaître le fils de Nicolas, Louis, né de sa brève liaison avec Antoinette dite La Satin – apporte quelque sel de nouveauté.
Le lecteur néophyte découvrira un roman au ton plaisant non dénué d'humour, agréablement descriptif, policier en effet mais offrant nombre de scènes bon enfant parfois cocasses – notamment autour de fines tables – et enfin parfaitement historique, avec force informations touchant à la politique du moment et aux usages de l'époque.
Quant à celui qui fréquente le commissaire Le Floch depuis ses débuts, il remarquera sans doute, en sus de quelques bévues – par exemple une victime qui, de Marguerite Pindron, devient à un moment Marguerite Pinchon, ou bien un Monsieur de Sartine bien vivant qui est compté au nombre des amis disparus de notre commissaire… (p. 176) – la très inopportune résurrection de Mauval, que l'on avait vu passé au fil de l'épée et envoyé ad patres dans L'Énigme des Blancs-Manteaux (p. 358). Certes, sa mort survenait dans la plus grande confusion mais l'on retrouvait bel et bien le corps en salle de basse-geôle prêt pour l'ouverture (p. 371). Or dans l'épilogue de ce roman-ci, Nicolas constate : « avec Camusot et Mauval qui courent, et sans compter mes amis anglais, cela fait beaucoup de monde à mes trousses dont il faut me méfier » (p. 388)… On a relevé plusieurs fois que la série de Jean-François Parot avait des mines de feuilleton ; un défaut dont on se gausse souvent vient donc conforter ce rapprochement : le semis d'incohérences…
NB – Le roman est paru en grand format en 2004.