Barthélemy Mazeirac est occupé à ensemencer son champ quand deux soldats lui demandent de les suivre jusqu'à Pradelles, en Vivarais, où l'attend le sire de Randon. Celui-ci l'a pris à son service, depuis qu'il a démêlé l'affaire du collecteur d'impôts disparu (Les Deniers du Gévaudan – même éditeur). Il le convoque pour démasquer l'assassin d'un notaire, lui demandant de reprendre des investigations, sur un meurtre vieux de dix jours. Randon l'a choisi parce qu'il est un paysan, un villageois, et qu'à ce titre, il saura se mêler à la population.
Ses questions dérangent et les premiers contacts avec les habitants de Saint-Clément sont empreints de retenue, de méfiance, voire d'hostilité. C'est avec l'aide du père prieur qui l'héberge dans son monastère, parce qu'il ne sait pas lire, que le sergent constate que le registre des actes qui couvre les années 1358 à 1361 a disparu, ainsi qu'un grand rouleau de vélin de première qualité. Ceux-ci sont relatifs aux conflits et au procès qui opposèrent les habitants du village menés par Nicolau Chabalier, au sire de Saint-Estève-du-Vigan. Alors que les paysans allaient avoir gain de cause, maître Richard, le notaire, exhiba un antique parchemin qui mentionnait que tailles et boyades étaient dues. Les habitants durent s'exécuter. Ysabellis doit reprendre les travaux agricoles abandonnés par Barthélemy. Elle embauche un manouvrier pour l'aider. Mais, très vite, elle va se trouver confrontée à un terrible dilemme… Pendant ce temps, Barthélemy, déjà menacé par un groupe d'hommes conduit par Nicolau Chabalier, est victime d'un attentat !
Sa parfaite connaissance des rouages judiciaires de l'époque permet à Lætitia Bourgeois de concevoir des intrigues subtiles, aux machinations novatrices. Dans Le Parchemin de maître Richard, elle intègre à la trame des obligations des paysans vis-à-vis de leurs seigneurs, une large palette de caractères et de sentiments humains. Elle joue avec une gamme des relations entre les individus. Si, initialement, celles-ci semblent simples, voire limpides, elles se complexifient et, au fur et à mesure de l'avancement de Barthélemy dans son enquête. Très vite, celui-ci fait face à un écheveau embrouillé de motivations ambiguës, d'ascendants anciens, de liens inavoués. Les faits s'expliquent alors à l'aune de ces rapports.
L'auteur mène son intrigue sans que la tension ne retombe, faisant croitre celle-ci avec des actes violents, des morts, des disparitions, jusqu'à une conclusion étonnante. Les personnages qui entourent les deux héros sont construits avec justesse et pertinence. Sa maîtrise de l'histoire du pays, de la vie quotidienne de ces populations, son aisance avec les plantes aromatiques et médicinales, lui autorisent des développements tout aussi passionnants, s'intégrant naturellement dans le fil dramatique de son récit.
Avec Le Parchemin disparu de maître Richard, Laetitia Bourgeois donne un roman superbe avec un grand moment d'histoire et de lecture-plaisir en compagnie de héros de chair et d'os.