Viggo Hansen est un vieil homme solitaire. Si solitaire que personne, même dans le voisinage, ne s’est rendu compte qu’il ne donnait plus signe de vie depuis quatre mois. Rien de plus normal puisqu’il est mort ! Même si les causes de sa mort sont sans doute naturelles, il est difficile après tant de mois d’avoir une certitude et William Wisting, l’inspecteur de la police locale, est chargé de s’en assurer. Il commence à se poser des questions lorsque, en même temps, on découvre dans les bois, caché sous un arbre, un autre cadavre mystérieux. Lorsque les premiers prélèvements montrent qu’il a sur lui des empreintes indiquant qu’il est peut-être un tueur en série américain recherché depuis des années, Wisting mène son enquête, de plus en plus troublée et troublante. Sa fille Line, journaliste, apprend de son côté la mort solitaire de Viggo, ce voisin qu’elle avait vaguement connu quand elle était enfant. Elle décide donc d’écrire un article pour évoquer ce phénomène qui touche de nombreuses personnes. Elle commence elle aussi son enquête et s’interroge afin de cerner la personnalité du mort. Et s’il avait été assassiné ? Mais qui peut vouloir tuer quelqu’un qui ne connaît personne, ne dérange personne et ne voit personne ? Pourquoi ? Peu à peu, naturellement, les deux enquêtes vont s’imbriquer.
L’Usurpateur est vraiment une enquête de facture classique, qui prend son temps. Wisting et ses coéquipiers cherchent qui est la victime, puis ratissent l’entourage et les éventuels témoins, puis élargissent le champ des possibles. Ici, la violence du tueur en série n’existe qu’en écho et, par-delà l’horreur de cette mort, on découvre que parfois, le tueur est le seul personnage qui interagit avec ses victimes. Des femmes disparaissent, semblent s’évanouir, et il est difficile de faire des liens. De même Viggo est emblématique de ces êtres que nous connaissons, qui traversent l’existence comme des fantômes, n’ayant que de vagues connaissances scolaires, de rares amis au boulot et une vie sentimentale aussi plate qu’une limande. L’atmosphère froide et désespérée des contrées nordiques est ici dépeinte avec soin par Jørn Lier Horst, avec cette angoisse frappante qui naît d’un coin de paysage anodin et bucolique contenant les restes d’un cadavre enterré ou jeté au fond d’un puits à qui des gens, policiers ou journalistes, cherchent sans relâche à redonner une voix.