Avouez que c'est toujours intéressant de se faire « mystifier » par un auteur et c'est ce que fait très habilement Dominique Manotti en ouverture de son dernier polar. Un polar qui se situe à Panteuil, banlieue parisienne où Sébastien Doche, arrivé de sa province, débarque pour sa première affectation : gardien de la paix stagiaire. Doche va découvrir le métier, le terrain et mesurer la différence entre ses idéaux et la réalité. Ses idéaux vont le pousser à mener une petite enquête personnelle, mais la réalité va le plonger dans un grand maelström de corruption, d'enjeux de carrière et de politique : le monde est sombre et complexe, à l'image des livres de Dominique Manotti. Doche va apprendre la base du métier avec différents collègues, chacun œuvrant suivant sa vision du monde et sa vision du métier. Il va croiser trois cow-boys de la Brigade Anti-Criminalité, la BAC, flics de jours, voyous de nuit (pour faire simple, mais Dominique Manotti peint tout ceci d'une façon bien plus subtile et recherchée), qui suivent chacun un but bien particulier. Et il sera sous les ordres indirects – elle ne remarque même pas les petits comme lui – du commissaire Le Muir, « l'étoile montante des copains du ministre […] convoquée à la demande du ministre lui-même à la prochaine réunion du groupe informel de réflexion qui élabore la politique sécuritaire du ministre de l'intérieur »… Manière habile pour Dominique Manotti de mêler ce microcosme de banlieue aux hautes ambitions politiques nationales. Cette plongée dans le quotidien de la vie de commissariat est habilement menée. D'un côté, la procédure basique, carrée, de l'autre le « facteur humain » qui brouille habilement les cartes : les repère s'effacent, les certitudes s'écroulent, le monde n'est pas binaire et le roman loin d'être manichéen. Porté par une écriture précise, une complexité dans les relations entre les différents protagonistes, ce roman revisite le genre de façon magistrale.