Paris. Saint-Tin, l'illustre reporter à veste de lin beige, journaliste vinicole et détective chevronné, rentre tranquillement chez lui quand il aperçoit deux voyous tabasser un clochard nippon. Il se jette dans la bagarre, en sort sans gloire mais intact, tandis qu'ils enlèvent le clodo. En quittant son appart un peu plus tard, fouillant ses poches, il y découvre un mot griffonné sur un bout de papier : « Il faut détruire l'Epeire de Fez », signé Carla B. Carla B. ? Non ?… Pas… Pas celle à qui vous pensez, quand même ?… Si ? Si ! en conclut Saint-Tin, la houppette excitée.
Les agents Yin et Yang ne tardent pas à entrer dans la danse : ils ont découvert un clochard très soleil levant poignardé dans le dos. Mais c'est pas le bon. Le bon, lui, gît au Maroc. Une mission, assurément. D'autant que dans le journal qu'exhibe leur ami le capitaine Ernest Aiglefin, la première page signale la présence du couple présidentiel à Rabat. Coïncidence ? Certainement pas ! Nos compères y convolent (enfin… À Rabat ils apprennent que la Première Dame a fait une fugue (c'était avant son voyage à Rome). C'est du moins la version officielle. En réalité, elle aurait été enlevée que cela n'étonnerait guère nos lascars. Il faut sauver la Première Dame ! Las, en guise de Carla B., c'est une Carla Boudjan qui s'offre à eux. Nipponne, comme son nom ne l'indique pas, elle est agent infiltré pour démanteler un gros réseau de drogue asiatico-africain : « L'Epeire de Fez ».
L'enquête s'avère difficile, car difficile de faire fonctionner le bon bout de la raison avec une équipe pareille. Rebondissement majeur : la Carla des jeans Dior réapparaît entre les mains de terroristes d'un autre âge, avant d'être libérée par nos vaillants missionnaires.
La couverture est sans appel. Il n'est pas jusqu'au nom de l'auteur qui ne signe avec brio la farce. Un pastiche, rocambolesque, fécond, loufoque à souhait. Une épopée éditoriale sans pareil, annonçait l'éditeur. Réussi ! Épigrammes, l'esprit de contre-escalier et l'à-propos dégainés sans façon, si vous n'aimiez déjà pas l'OuLiPo, passez votre chemin. Sinon, lisez-le sans rire, si vous le pouvez.