Joanna passe une soirée entre amies dans un pub lorsqu’elle est la proie d’un dragueur lourd qui finit par devenir agressif. Fin de l’histoire ? Non ! Parce qu’alors qu’elle rentre chez elle, Joanna entend des pas derrière elle. Elle en est sûre, ce ne peut être que l’homme du bar en quête d’un mauvais coup. Alors qu’il est presque sur elle, la jeune femme le repousse et il fait une mauvaise chute. Stupeur : il s’agit d’un parfait inconnu ! L’enquête montrera qu’il s’agissait juste d’un joggeur tardif. Pour l’heure, que faire ? Appeler aussitôt la police, au risque de faire face aux conséquences ? Car il y a ce moment de sidération ou le malheureux est resté le nez dans une flaque d’eau assez grande pour qu’il se noie, et qui va revenir la hanter, puisque le joggeur subit des séquelles psychologiques. Ou bien alors rentrer chez soi, à sa petite vie, son mari, son frère, et devoir faire face au démon de la culpabilité ? Partir ou rester. Fuir ou lutter. Action ou vérité. Que choisir ?
Gillian McAllister nous propose un thriller domestique aux bornes du genre puisque, comme toujours, est décrit par le menu tout ce qui arrive à la protagoniste, même le plus trivial. Sauf que le tout est fait avec beaucoup plus de talent que la moyenne, surtout vu l’état du genre en Anglo-Saxonie. On est une fois de plus aux frontières grises entre la littérature dite blanche et la noire. Pas tant à cause de la profondeur du propos, que sur un véritable travail de psychologie, notamment sur la culpabilité, loin des personnages limités à deux caractéristiques sur un post-it en salle de développement, mais aussi parce qu’il y a une écriture bigrement travaillée (et donc une traduction plus qu’irréprochable), surtout vu la chute de niveau actuelle. Bien sûr, on est une nouvelle fois dans les affres de la classe moyenne aisée, mais n’est-ce pas le cœur de cible de ce genre de romans ? Comme il est dit, la structure alterne ce qui se passerait dans les deux cas de figure sans qu’on s’y perde un seul instant tant le tout est maîtrisé. Le parti-pris de crédibilité impose de détailler la vie quotidienne de la narratrice, heureusement moins ennuyeuse que les protagonistes dans ce genre de roman, tant cet accident impose une remise à plat de ses valeurs, le tout sans les grandes orgues habituelles du thriller industriel. Et c’est plutôt une bonne chose !