Ancienne analyste de la City, Besse Porter fait une fausse couche qui lui ouvre les yeux. Elle décide alors de réaliser son rêve : ouvrir une librairie-salon-de-thé majoritairement dédiée à son auteure préférée, Jane Austen. Après maintes recherches de l’endroit idéal, ce sera Abbeyfield, un petit village perdu des Cotswolds. Après trois mois de travaux, le « Jane’s Cup of Tea » est au bord de l’inauguration, mais c’est le drame : une vieille dame du village, Evie Smith, est retrouvée morte assassinée dans l’arrière-boutique. Apparemment, son assassin disposait de la clé et le meurtre a été commis avec l’un des couteaux de Besse ! L’inspecteur Clark va-t-il tomber dans le panneau face à des indices un peu trop évident ? Quel serait le mobile alors que Besse avait à peine entrevu la vieille dame ? Evie Smith avait certes critiqué la librairie, mais cette vieille harpie détestait le changement et répandait des commérages sur tout est n’importe quoi. D’après sa dernière amie, la vieille dame avait changé du tout au tout à la mort de son mari et grand amour, Thomas. Thomas qui tenait une boucherie dans les locaux rachetés par Besse pour y tenir sa librairie…
Comme on l’a dit, il ne manque rien à cette intrigue qui semble écrite en suivant à la lettre les règles du genre en les modernisant à peine (l’ami homosexuel de service), avec également le second meurtre une fois atteint le nombre de pages requis (traité un peu par-dessus la jambe, comme si c’était juste un passage imposé). Jusqu’aux recettes en fin de volume, désormais obligatoire depuis l’ennuyeuse série de Joanne Fluke qui continue à servir la même soupe depuis trente (!) tomes. Et, bien sûr, il n’y a rien de méchant ou de véritable suspense, rappelant qu’en Anglo-Saxonie, le terme de « cozy mystery » est plutôt péjoratif (des romans aseptisés, tous semblables, sans sexe ni violence, que l’on emprunte à la bibliothèque pour sa grand-mère. Ce qui semble être une vision bien condescendante des goûts desdites grand-mères, mais c’est une autre histoire.) Les amateurs se rebattront sur les classiques d’Agatha Christie, voire de Ngaio Marsh. Cependant, comme on l’a dit, la différence ici est cette petite chose, pas indispensable pour vendre du livre, qui s’appelle le talent. Lorie Forêt réussit à tisser une ambiance certes un brin pastel, mais au moins une ambiance (la plupart ne prennent même pas cette peine) et ses personnages ressemblent à des vrais humains, pas à de simples notes de caractéristique sur post-it en salle de développement. Dans le genre, on peut trouver pire (et même nettement pire), même si on aimerait que l’auteure sorte un peu des sentiers balisés. Elle, au moins, a le talent pour se le permettre…