La narratrice de ce roman est une auteure, une auteure qui n’écrit plus, qui n’y arrive plus et se désole de voir le monde partir à vau l’eau. Elle aimerait convaincre le monde qu’il faut être bon avec les animaux et ne plus les manger. Réfugiée à la campagne avec son mari, plus âgé qu’elle et qui s’apprête à finir un nouveau roman, pour lequel il espère avoir des prix littéraires, elle rumine sa détestation du monde. Elle doit parfois faire avec ses beaux-parents qui lui proposent des plats à base de viande à chaque fois qu’elle vient. De plus en plus, au fil des pages, le discours de la narratrice va devenir violent et elle va imaginer ou réaliser des actes de plus en plus monstrueux, tuant des gens sans souci, au petit bonheur la chance, s’enfermant de plus en plus dans sa folie.
Le roman de Loulou Robert n’intéresse pas tant dans la description violente et sanglante des différentes actions de la narratrice, mais plutôt dans le déroulé-logorrhée de ses actes et paroles pour mettre en accord ses pensées et sa vie. Tandis que son mari se prépare pour obtenir des prix littéraires et que l’agent de la narratrice essaie de lui faire écrire un nouveau texte – même si ce serait quelque chose de l’ordre de l’essai sauvage sur les bienfaits de l’animal -, le roman nous enferme par cercles concentriques de plus en plus serrés dans son discours (et ses actions), nous faisant partager sa folie (ou selon elle sa grande sagesse !). Sorte de version célinienne dans les contours étranges d’un cerveau humain en pleine ébullition, Déshumaine est un travail littéraire intelligemment mené.