Nina Palester est une jeune Canadienne émigrée qui vit avec ses parents à proximité de l’université où elle achève des études liées à l’informatique et a même un bureau parce qu’elle fait quelques petites taches pour l’administration. En même temps, elle a une liaison amoureuse avec Yuri. Mais tout ce que vous venez de lire est faux : Nina, de son vrai nom Ekaterina Yegorova, est une orpheline russe, entraînée depuis son enfance par les services secrets de son pays. Elle vit chez un couple d’illégaux russes formés et arrivés là du temps de l’Union Soviétique et son copain est aussi un espion. Quant à son travail, il sert surtout à masquer qu’elle fait des copies discrètes des travaux de cryptage de ses professeurs. Mais c’est alors qu’elle reçoit une nouvelle mission de son chef, Anton. Il s’agit de s’infiltrer au sein d’une réunion du G7 dans un hôtel canadien et de prendre contact avec un officiel américain qui trahit son pays et doit lui transmettre un clé USB très importante. La mission est capitale mais Nina est inquiète car elle a l’impression d’être surveillée depuis quelques jours et, un soir, elle est même agressées par son suiveur, repéré par elle, et aidé par un autre homme qui disparait, sans demander de remerciements. De plus, quand la mission débute, elle découvre que Yuri est très fébrile, ce qui n’est pas son genre, et que le traître est sur le point de craquer : il boit beaucoup et ne veut plus donner la clé aux Russes mais l’offrir à la CIA. Tout pourrait exploser en plein vol surtout quand Nina apprend que la clé contient des informations très compromettantes pour le président des États-Unis et que de nombreux services voudraient s’en emparer.
Comme nous sommes dans un roman d’espionnage centré autour de Russes, il est logique, voire facile, d’évoquer les poupées gigogne. Le roman de Chloé Archambault en est une parfaite illustration : chaque événement découvre une nouvelle couche, chaque personnage est un espion certes, mais potentiellement un agent double ou triple. Certaines missions sont des leurres à l’intérieur d’autres missions. On ne sait jamais si l’on suit les ordres de la centrale ou les intérêts particuliers de tel ou tel chef qui suit son propre calendrier ou travaille en sous-mains pour des oligarques. Cette structure en pelure d’oignon se continue jusqu’aux pages ultimes où nous verrons se succéder des nombreux retournements, tous amenés de manière logique et crédible. À l’intérieur de cette construction ciselée, le personnage de Nina nous accompagne dans un mélange de réflexions, de doutes (sur sa mission, ses acolytes, sa propre vie) et d’actions menées tambour battant pour se sortir des pièges tendus par la police, les services secrets, voire ceux qu’elle considère comme des alliées ou amis. Le mélange est ainsi particulièrement réussi et ne laisse que peu de répit au lecteur ballotté du début à la fin dans une intrigue maitrisée par une auteure canadienne que nous découvrons à l’occasion. Alias Nina P. est un roman d’espionnage qui donne bien envie de la suivre un bout de chemin.