Au début du célèbre film de Jean-Pierre Melville est cité une phrase de Bouddha : « Quand les hommes, même s’ils s’ignorent, doivent se retrouver un jour, tout peut arriver à chacun d’entre eux, et ils peuvent suivre des chemins divergents ; au jour dit, inexorablement, ils seront réunis dans le cercle rouge » C’est un peu ce qui arrive aussi dans ce livre dont le titre est lui-même (et c’est évoqué dans le roman) une reprise d’un livre de Balzac. Valentin, homme discret, ancien soldat de l’armée française, s’est découvert des passions sadiques, des passions qu’il cache à sa femme et son fils, même si les liens se distendent ces derniers temps. Ils se distendent car depuis trois ans, l’homme a enlevé Margot, une jeune fille, qu’il a emprisonnée dans une cache secrète sous son atelier et qui doit lui lire justement du Balzac pour l’apaiser. Mais Valentin est aussi un des hommes à tout faire d’un gang qui enlève des jeunes femmes, les torture et les viole, les livrant à de riches clients ou les torturant pour des amateurs adeptes de snuff movies. Mais le gang commence à s’inquiéter car Valentin semble de plus en plus hors de contrôle, de par ses obsessions. En parallèle nous allons suivre Margot qui, malgré son calme dans sa prison, cherche à tout prix à s’évader et réfléchit à un plan.
En même temps, nous allons observer un groupe écologiste qui a décidé de passer à la vitesse supérieure en commettant des actes violents pour promouvoir sa cause. Surtout, un des responsables se sait atteint d’une maladie qui le condamne et il est prêt à dépasser les bornes. Lors d’une attaque dans un magasin des Champs Élysées, en marge d’une manifestation, le groupe liquide ainsi des clients, mais il s’en trouve un pour s’interposer et parvenir à tuer quelques membres du groupe. Zed s’enfuit. Or ce client n’est autre que Valentin. D’une part, ses chefs ne sont pas contents car ils ont peur que l’attention soit portée sur cet homme (et en tout cas Zed l’a reconnu lors des journaux télévisés, lui qui s’est réfugié chez un ami et qui veut se venger). D’autre part, un policier qui enquête sur des meurtres de femmes violées et torturées découvre des similitudes dans leur mort avec les blessures infligées aux terroristes écologistes. Enfin sortant de l’hôpital, encore blessé, il est assommé par Margot qui s’enfuit, mais ne veut pas le dénoncer, voulant qu’il meure.
Comme le prédisait Bouddha, quoi qu’ils fassent les différents protagonistes vont se croiser et se combattre, dans une série logique amenée avec soin par Fabrice Jambois, un auteur qui maitrise son intrigue. Les personnages, poursuivis par leurs propres obsessions se démènent et les fils disparates au début s’entrecroisent avec grâce au long d’un roman dense, violent, où cohabitent diverses facettes du crime : la psychologie perturbée des uns, le besoin d’argent d’autres, le désir de créer un monde plus juste. Cette entremêlement crée un texte mouvant et fort qui a aussi le mérite de ne pas juger ses personnages (au moins certains) au moment de les décrire dans leurs actions, y compris violentes en en explicitant la logique « normale »