Nous sommes au début des années 1960. Jimmy Hoffa est un « syndicaliste » lié au milieu du crime et il est au centre de plusieurs enquêtes qui pourraient lui valoir quelques soucis. Pour s'en sortir, il fait appel à Fred Otash, un personnage bien connu des lecteurs de James Ellroy. Hoffa a une idée : il a entendu dire que Marilyn Monroe couchait avec les frères Kennedy et que peut-être il y aurait des choses dévoilées sur les oreillers. Il demande donc à Otash de mettre tout en œuvre pour truffer la maison de l'actrice de micros et d'en savoir plus. Le but est soit de posséder des informations sur ce qui le concerne, soit de le mettre en capacité de faire chanter le Président qui va bientôt briguer un deuxième mandat. Alors, Otash met tout en place avec ses hommes. Pour placer les micros, il va même donner de sa personne en entrant chez l'actrice. Il repère lors de sa visite des éléments qui lui paraissent étranges et décide de mener en même temps une enquête sur son passé. En effet, il y a eu, entre autres à la fin des années 1940, une autre actrice pour défrayer la chronique qui s'est suicidée. Des photos prises à la morgue circulent même sous le manteau. De même Otash veut travailler autour de rumeurs sur le passé de l'actrice : elle aurait été prostituée et aurait même posé dans des positions scabreuses pour une série de 52 photos (un jeu de cartes !). Mais un soir, Otash est convié pour une autre mission : celle de récupérer une autre actrice qui aurait été enlevée par des truands. Lors de la libération, l'un des ravisseurs est sauvagement assassiné par les policiers. Et juste après, Otash apprend que l'on vient de découvrir le corps de Marilyn… Il lui faut donc vite récupérer ses micros. Mais pourquoi retrouve-t-on chez elle une photo de la morgue et de l'autre actrice ? Les Kennedy commencent à également mettre la pression sur Otash à cause du meurtre du truand. En s'appuyant sur sa violence naturelle, sur ses relations sexuelles avec Pat, une sœur des Kennedy (et accessoirement la femme d'un acteur qui organise des soirées fines chez lui), et sur l'absorption de substances diverses, Otash va essayer de se sortir de ce « faux pas ».
Alors que les lecteurs attendaient plutôt un nouveau volet de l'histoire consacrée aux événements californiens des années 1940 dans une série pour l'instant inachevée, James Ellroy nous offre un détour avec un personnage auquel il s'est déjà intéressé : un policer peu honorable mais efficace qui opère en marge d'un événement traumatique des États-Unis (déjà évoqué dans d'autres textes). Il s'attaque à la vie des dernières années de Marilyn Monroe, ses frasques et sa liaison avec le Président. Construit à la manière de James Ellroy, par une suite de paragraphes courts, détaillant avec soin les actions et les pensées du personnage (y compris dans des scènes plus fantasmées, sous drogue, que réelles), ressassant et revenant sur les mêmes éléments pour leur donner un sens (et in fine, donner une version de la mort de l'actrice et de ses raisons). Le lecteur y retrouvera la logorrhée du romancier américain, ses obsessions et son style, sa marque de fabrique. Difficile de lâcher le roman une fois entamé, dans son train émotionnel, comme aurait dit Céline. Les Enchanteurs est un très bon polar, nerveux et fort, même si, il faut l'avouer, James Ellroy nous à habitué à bien mieux.
