CHRONIQUES

livres • bandes dessinées • comics
Prix : 20
INFORMATIONS LIVRE
Édité chez
Collection :
ISBN : 978-2-7436-2589-4
Nombre de pages : 302
Format : 16x23cm
Année de parution : 2010
Titre original : The Singer's Gun
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Contexte
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8 / 10

On ne joue pas avec la mort

Série :

La profondeur de la surface des choses

Anton est bien un cadre d'entreprise de notre temps : technophile, un tantinet immature, un peu égocentrique, vivotant sans trop se soucier des désastres que son propre fonctionnement provoque – à un moment du roman, il enverra un ami à rendez-vous mortel. Le sait-il ? Le soupçonne-t-il seulement ? L'indécision demeurera. Mais Anton va se marier même si par deux fois déjà sa fiancée, au dernier moment, a repoussé la date. Alors Anton retourne travailler dans une entreprise où il est mis dans un placard doré qui lui permet de jouer au basket avec des boules de papier et de tromper son ennui e, imaginant des jeux érotiques avec sa secrétaire. Finalement, Anton part en voyage de noces mais il est surtout chargé par sa cousine d'y attendre un inconnu pour lui remettre un petit paquet, même si pour ce faire, il ne doit pas revenir de son propre voyage de noces !
La vie d'Anton peut vous sembler étrange. C'est pourtant le thème et l'intrigue de ce nouveau roman d'Emily St. John Mandel. En 1988, Paul Auster avait introduit des préoccupations post-modernes dans le roman noir avec sa « Trilogie new-yorkaise ». Aujourd'hui, cela contamine de bien belle manière le thriller. Anton vit de magouilles, et lorsqu'il décide de devenir honnête, les choses se déglinguent. Les personnages trompent leur ennui dans l'attente d'événements qu'ils ne maîtrisent pas et dont ils semblent peu se soucier. Le style de l'auteur restitue à merveille ces plages de langueur, ces moments de rien, ces allers-retours dans une réalité si concrète qu'elle en devient abstraite et absurde, jusque dans le dénouement final qui confirme l'amoralité du monde.
Tout le monde se promène lentement sur des plages paradisiaques, savoure des sorties au restaurant. Cet univers aseptisé, où l'on parle d'art et de culture, de facultés prestigieuses, fait d'autant mieux ressortir les morts en hors champ, les trafics d'être humains dans des conteneurs, des réseaux de prostitution qui n'hésitent absolument pas à tuer, toutes ces « saletés » qui font fonctionner le beau monde, mais qu'il est si facile d'oublier, même lorsque c'est son propre gagne-pain. En cela, le nouveau roman d'Emily St. John Mandel est une pure réussite.

Article initialement paru le 13 octobre 2013
Publié le 21 mai 2025
Mis à jour le 21 mai 2025
Non pas qu'il fut tombé en désamour – indifférence n'était pas le bon mot, c'était à la fois plus doux et plus précis -, mais il n'était pas sûr du tout d'avoir eu raison de l'épouser.
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