Ex-officier de l'Armée Rouge, rescapé d'Afghanistan et de Serbie, Skif « le loup » revient dans la Russie de Boris Eltsine, celle des oligarques et des magouilleurs. Or son épouse Olga Korobova a su faire son trou, puisqu'elle est devenue présentatrice vedette à la télévision. En cherchant à la recontacter, Skif va mettre en branle des forces qui les dépassent tous les deux…
Le roman russe moderne est décidément un goût acquis, héritier direct des feuilletonnistes avec son ampleur épique, ses péripéties picaresques, ses innombrables personnages et ses nombreuses digressions parfois déroutantes. Il n'en est pas autrement avec cet énorme roman tragi-comique qui en profite pour dresser un constat accablant de l'ère Eltsine, lorsque le pays prenait le virage de l'ultralibéralisme à marche forcé à grand coups de culte du fric. S'y entremêlent toutes les strates de la société, des petits truands pittoresques (dont l'invraisemblable duo Groin-Groin et Badaboum, deux Pieds Nickelés des bords de la Volga) aux grands magouilleurs faussement respectables capables de tuer père et mère — quasi-littéralement — pour un contrat juteux. Le tout avec assez d'explosions, de raids, de fusillades, et de grand spectacle pour remplir trois blockbusters propulsés à la vodka à travers une intrigue criminelle qui, une fois détricotée, s'avère extrêmement simple. Ce genre de romans est un goût acquis, disais-je, et là, celui-ci vaut largement le coup de se faire une douce violence… À noter l'érudition de la traduction qui permet de clarifier un nombre impressionnant de références historiques et littéraires : exotisme garanti !