Pascal Rabaté au scénario et Sébastien Gnaedi au dessin en bichromie se font plaisir dans une bande dessinée où l'humour noir et caustique rivalise avec la férocité d'une vengeance (qui se mange très froide puisque vingt ans après les faits et un premier élan avorté). L'histoire narré est l'une des plus anciennes de l'Histoire. Un homme, une femme, un amant et une envie de meurtre. Mais alors qu'il a suivi sa femme et son amant dans un sinistre hôtel, le mari bafoué armé d'une carabine se trompe de chambre et assassine un autre couple (sans que l'on sache cela dit même si on s'en doute si ce dernier est lui aussi adultérin), pendant que celui visé se carapate vite fait bien fait. S'ensuit un procès avec des titres de journaux moqueurs et surtout vingt ans de prison. Mais l'homme a le temps alors de ressasser sa vengeance et a décidé de retenter sa chance, et d'abattre en prime toute progéniture hypothétique. Le scénario de Pascal Rabaté pourrait être d'une banalité crasse et humaine, mais le bougre a la plume taquine. Alors, les faits à venir mettent en avant une famille Groseille (revoyez La Vie est un long fleuve tranquille) encore plus vulgaire et qui aurait l'arnaque dans ses gênes. La vie de son ancienne femme n'est franchement pas idyllique et l'on est en droit de se demander pourquoi elle a quitté un homme pour un autre, qui est un ramassis de ce qu'il y a de pire chez l'homme. Le couple vit avec des enfants, les beaux-parents et les copains-copines des enfants dans une maison laissée à l'abandon. Il vit de rapines et ce d'autant plus que la fille a eu le bon chic de s'acoquiner avec un vigile de supermarché (bien plus facile de chaparder après). Notre bras vengeur, quant à lui, observe tout ça et peaufine son plan. Il passe à l'action avec tout d'abord de la provocation puis de la finesse. Mais à trop vouloir en faire, il va lui aussi s'attirer beaucoup d'ennuis. Pour illustrer ce sordide fait-divers, Sébastien Gnaedig fait preuve d'une jolie bichromie au trait stylisé. Ses personnages ont quelque chose de sympathique. Il réussit à donner du relief à des personnalités sans. Il excelle avec un noir qu'il dissémine un peu dans chaque planche.
